Habitation linéaire marocaine
Dans la plaine ensoleillée du Haouz, où le silence du désert est ponctué par les murmures des anciens systèmes hydrauliques, Leopold Banchini a conçu Dar El Farina, une habitation linéaire qui honore et ré-imagine à la fois son environnement.
Cette maison rurale hors réseau navigue entre l’intervention humaine et l’austérité brute de la nature. En alignant la maison avec deux infrastructures hydrauliques historiques, le mesref et la khetara, Banchini fait le lien entre des siècles d’ingéniosité agricole et la pensée architecturale moderne.
Le résultat est un espace qui invite à la contemplation : un sanctuaire où le design, l’histoire et la durabilité convergent.
Deux infrastructures vitales traversent cette étendue aride de la plaine du Haouz. La première, un mesref, est un modeste canal d’eau qui se remplit quelques fois par an, alimenté par un réseau labyrinthique de canaux provenant des montagnes du Haut Atlas. La seconde, une khetara, est une ancienne galerie de drainage souterraine construite par les Almoravides il y a plus d’un millénaire pour transporter les eaux souterraines vers Marrakech. Bien que souvent cachée à la vue, l’eau façonne profondément ce paysage aride. Pendant des siècles, les humains ont domestiqué la plaine, irriguant et divisant les champs par d’interminables étendues de murs en terre.
Dar El Farina est une habitation rurale linéaire qui s’aligne sur les chemins du mesref et de la khetara. La maison sert de limite, divisant le territoire en deux terrains distincts. D’un côté, le désert intact persiste ; de l’autre, un jardin verdoyant s’épanouit de plantes indigènes, nourries par ces systèmes d’eau séculaires. Entièrement hors réseau, la maison dépend de la lumière du soleil, du sol et de l’eau provenant du site, ce qui lui permet d’atteindre une autosuffisance complète.
La résidence est définie par deux murs parallèles en terre battue qui entourent une séquence de pièces, de patios et de bassins d’eau. La lumière du soleil filtre à travers des ouvertures et des puits de lumière soigneusement positionnés, animant les intérieurs avec des motifs changeants de lumière et d’ombre. De larges portes pivotantes offrent la possibilité de cloisonner ou de fusionner les espaces, brouillant les frontières entre l’intérieur et l’extérieur. Cette structure de vie évolutive ré-interprète la typologie traditionnelle et tournée vers l’intérieur de la maison-patio.
La construction utilise de la terre comprimée pour les murs et les sols, se fondant parfaitement dans le paysage. Au-dessus, les ouvertures zénithales sont ornées de carreaux de zellige colorés, fabriqués par des artisans d’un village voisin. Ces carreaux traditionnels réfractent la lumière du soleil en un spectre de teintes, qui dansent ensuite à la surface de l’eau. Les murs épais en terre, la lumière du soleil calibrée, les jeux d’eau et la végétation abondante se combinent pour créer un microclimat frais, un refuge tranquille dans le désert.