Un jalon pour la durabilité
Le nouvel hôtel de ville de La Pêche (Canada) est un bâtiment de deux étages à très haute efficacité énergétique et à très faible empreinte carbone intrinsèque et opérationnelle. Il est aussi le premier bâtiment institutionnel québécois à être candidat à la certification Passivhaus.
Il est localisé à la porte d’entrée de la municipalité de 8600 habitants et fait front sur la route provinciale 366, juste en face du chemin du Lac Philippe, l’un des principaux accès au Parc de la Gatineau.
Il abrite un programme classique : hall d’accueil, aire de réception, comptoir de paiement des taxes, comptoir de consultation des permis, salle du conseil, salle multifonctionnelle, salles de réunion, cuisinette, aire de lunch, espace de repos, ainsi qu’une combinaison de bureaux fermés et en aires ouvertes. La superficie du bâtiment est de 1417 m2.
La grande façade sud, conçue selon les principes solaires passifs offre une vue panoramique sur les collines du Parc de la Gatineau. Très largement vitrée, cette façade est constituée d’un mur rideau structurel en bois dont le rythme et les éléments de contreventements font écho aux structures traditionnelles des ponts couverts de la région. Le soir venu, l’aspect chaleureux de la toiture en CLT et les détails du mur rideau tout en bois se révèlent grâce à une stratégie d’éclairage direct et indirect.
Cet hôtel de ville se démarque particulièrement sur 3 aspects :
- Il est presque entièrement constitué de bois, une ressource locale qui, historiquement, a consolidé l’économie de la région. La structure est composée de poutres et de colonnes en bois lamellé-collé et de planchers et toitures en panneau de bois lamellé-croisé (CLT). Toutes les cloisons intérieures et tous les assemblages de murs extérieurs sont en ossature légère en bois. L’isolant des murs est une combinaison de cellulose injectée et de panneaux de fibre de bois. Le revêtement extérieur est en cèdre de l’est installé sur des fourrures en bois. Les portes et fenêtres sont en bois avec recouvrement en aluminium du côté extérieur. À l’intérieur, les plinthes sont en érable. Le mobilier d’accueil, incluant les comptoirs de paiement de taxes et de consultation pour permis, intègre également du bois dans leur conception. Le bâtiment est ainsi un important puits de carbone.
- Il est conçu selon la norme internationale d’efficacité énergétique Passivhaus, qui permet d’économiser 65 % de l’énergie de chauffage et de climatisation lorsque comparé aux normes — rehaussées — en vigueur depuis 2021. Il est le premier bâtiment institutionnel candidat à la certification Passivhaus au Québec. L’atteinte de la norme dépend de plusieurs facteurs, dont les principaux sont : la forme simple du bâtiment et son ratio avantageux enveloppe/aire de plancher, l’isolation supérieure de ses murs et de sa toiture, le positionnement précis des fenêtres selon l’orientation, l’étanchéité à l’air exceptionnelle — validée obligatoirement par des tests d’infiltrométrie — et les composantes architecturales clés certifiées par le Passivhaus Institute allemand. Dans le climat québécois, l’approche Passivhaus commande de bien réguler le rayonnement solaire à l’intérieur du bâtiment. Au sud, un double brise-soleil a été conçu pour couper le rayonnement solaire en été et réduire drastiquement les besoins en climatisation, tout en maximisant cet apport solaire en hiver. De fait, la principale source de chauffage du bâtiment lors des mois les plus froids est le rayonnement solaire direct.
- Le concept structural de la toiture permet de couvrir une portée de 18 m sans poutres, sans solives ni appuis intermédiaires. Des panneaux en bois lamellé-croisé (CLT) 5-plis de 175 mm d’épaisseur sont connectés entre eux en dents de scie. Ils créent de multiples pignons qui évoquent les toitures des ponts couverts du secteur, notamment celui situé directement en face de l’hôtel de ville sur le chemin du Lac-Philippe, un des principaux accès au Parc de la Gatineau. D’un point de vue technique, les plaques en CLT — inclinées les unes vers les autres à un angle de 40 dégrées — travaillent de façon bidirectionnelle, tirant profit de la capacité structurelle du CLT dans les deux directions, en analogie à un caisson de grande profondeur. Historiquement, cette typologie a été exploitée pour des charpentes en béton pour réaliser des structures dites en plaques pliées (folded plate), mais la typologie est sous-utilisée dans les charpentes en bois. En plus de son attrait esthétique et sa logique structurelle, ces longues portées permettent d’éviter complètement les colonnes au deuxième étage, de dégager la vue magnifique sur les collines du Parc de la Gatineau et d’offrir une grande flexibilité des aménagements intérieurs pour toute la durée de vie du bâtiment.
Le projet a obtenu le prix Cécobois 2025 dans la catégorie développement durable et a remporté un Prix d’excellence 2025 décerné par l’Ordre des architectes du Québec.